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Scène VI

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Maximian, Sévère.

maximian.

Quoi, pousser des soupirs en quittant la Princesse ?

sévère.

Ah, Seigneur, épargnez la douleur qui me presse.
Je ne vous parle point en amant outragé
De l’abîme des maux où vous m’avez plongé,
C’étoit à mon orgueil un attentat insigne
D’écouter un espoir dont je n’étois pas digne.
Le rang d’Impératrice, et l’éclat qui le suit,
Valent bien la disgrâce où je me vois réduit ;
Mais si quelque pitié pour moi vous intéresse,
Sauvez-moi, d’un refus honteux à la Princesse,
Prévenez un éclat où je suis résolu.
J’aime, Seigneur ; hélas ! Vous l’avez bien voulu,
Et quoique sans espoir l’amour soit un supplice,
Puisque c’est mon seul bien, souffrez que j’en jouisse.
Par un hymen illustre on tente en vain ma foi,
En vain on veut qu’un Trône ait des charmes pour moi ;
C’est un surcroît de rage à ma douleur extrême,
Je ne veux que mourir aux yeux de ce que j’aime,
Lui soumettre mes jours, et les abandonner
À la triste langueur qui les doit terminer.

maximian.

Quoi, Sévère, il se peut que le sort qui t’outrage
Te fasse des malheurs plus grands que ton courage ?
Apprends, apprends les miens, et pour sortir d’erreur
Vois comme la Fortune accable un Empereur.
Si j’osai la braver en dédaignant l’Empire,
À son tour contre moi je vois qu’elle conspire.
En vain auprès d’un fils des Romains adoré
Je crois jouir du calme où j’avois aspiré,