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Et craignez qu’à sa rage abandonnant vos jours,
L’un ne soit sans vengeance, et l’autre sans secours.


Scène II


Sinorix, camma, phénice, phaedime

Sinorix.

Madame, je sais bien que vous devant la vie,
Que sans votre secours un lâche m’eut ravie,
On auroit dû déjà me voir à vos genoux
Vous consacrer cent fois ce que je tiens de vous ;
Mais j’ai crû dans l’ardeur du courroux qui m’enflamme
Vous devoir dérober les troubles de mon âme,
Sans cesse, je l’avoue, il me vient animer,
Et toute mon étude a peine à le calmer.

camma.

La cause en est trop juste où le crime est extrême,
Mais souvent il est beau de se vaincre soi-même,
Et d’attacher sa gloire à ce pompeux éclat
Dont brille le pardon d’un indigne attentat.

Sinorix.

Madame, c’est à quoi j’avois su me contraindre,
À Sostrate déjà j’ôtais tout lieu de craindre,
Et faisant sur moi-même un généreux effort,
Je laissois la Princesse arbitre de son sort ;
Mais avec tant d’orgueil, mais avec tant d’audace
Tous deux ont dédaigné que je leur fisse grâce,
Qu’il faut qu’un châtiment aussi juste que prompt
Par le sang du perfide en répare l’affront.

camma.

Quoi, la pitié pour lui ne touche point votre âme,
Lui qui vous fut si cher, lui qu’enfin…