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Mais aussi dès demain pour finir mon supplice,
Je veux avecque lui que l’hymen vous unisse,
Et que par ce revers mon malheur confirmé
M’arrache au fol espoir de pouvoir être aimé.
Ce sont les seuls partis qui vous restent à prendre,
Ou donnez votre main, ou m’y laissez prétendre,
Et jugez, dans le choix que je vous offre ici,
Si c’est être tyran que d’en user ainsi.
Je vous laisse résoudre ou ma gloire ou ma peine ;
Vous, Sostrate, attendez les ordres de la Reine,
Et songez à me faire un fidèle rapport
Si tôt que sa réponse aura réglé mon sort.


Scène V


camma, Sostrate

camma.

Ton silence, Sostrate, a droit de me confondre,
Sinorix a parlé, c’est à toi de répondre,
Le temps presse, on menace, et sans plus différer
Ou pour l’un ou pour l’autre il faut te déclarer.
Si mon cœur est pour toi d’un prix assez insigne,
S’il remplit tes désirs, tu peux t’en rendre digne,
Mais aussi, c’est un bien qui doit peu te flatter
Si tes vœux incertains n’osent le mériter ;
Car enfin quelque espoir dont ma main t’entretienne,
Tu ne peux l’obtenir sans faire agir la tienne,
Et je m’apprête en vain à couronner ton feu
Si Sinatus vengé ne m’en donne l’aveu.

Sostrate.

Madame, il est aisé par mon désordre extrême
De juger des combats que je rends en moi-même,
Non que j’aspire enfin qu’à mériter un bien
Sans qui tout m’est fatal, sans qui tout ne m’est rien ;