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ACTE II



Scène I


Sinorix, hésione, phaedime

Sinorix.

Je vous le dis encor, c’est à vous de résoudre.
Il est en votre choix de repousser la foudre,
Je la tiens suspendue, et malgré mon courroux
J’ai peine à consentir qu’elle éclate sur vous ;
Mais votre orgueil m’y force, et de quoi qu’il vous flatte,
Si vous n’y renoncez en faveur de Sostrate,
Je sais ce que je dois à ses feux méprisés
Au défaut de l’aveu que vous lui refusez.

hésione.

Certes, jusques ici l’exemple est assez rare
Que contre l’injustice un Tyran se déclare.
J’en fais une, il est vrai, si Sostrate confus
À l’orgueil de mon sang impute mes refus ;
Mais quel aveuglement fait que tu me l’opposes ?
La veux-tu condamner quand c’est toi qui la causes
Et que par l’attentat qui t’élève aujourd’hui
Tu m’ôtes le pouvoir de rien faire pour lui ?
Tu le plains de montrer une vertu sublime
Sans qu’à peine il m’en coûte un sentiment d’estime,
Mais ce charme brillant dont mon cœur est surpris,
Quand il se donneroit, demande un plus haut prix.
Au lieu de lui prester cette pitié frivole,
Rends-moi l’éclat du rang que ta rage me vole,
Alors tu connoîtras s’il faut me reprocher
Que l’amour d’un héros ne puisse me toucher.