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C’est à toi de chercher à m’en rendre capable,
Mon estime déjà t’est assez favorable,
Je connois ton mérite, et sais que dans ton rang
Jamais plus de vertu ne soutint un beau sang.
Tu vois que je commence, achève, entreprends, ose,
Peut-être un seul obstacle à ton bonheur s’oppose.
J’aspire à me venger, et ce fier mouvement
Éloigne de mon cœur tout autre sentiment.
Plein d’une passion et si juste et si forte,
Pour y faire entrer l’une, il faut que l’autre en sorte,
Et ta flamme à l’espoir cherche en vain quelque jour,
À moins que la vengeance ait fait place à l’amour.
J’ai reçu du tyran le plus sanglant outrage,
Tu le sais, je n’ai rien à dire davantage :
Ou du feu qui te brûle écoute moins l’appas,
Ou ne m’offre ton cœur qu’en suite de ton bras.

Sostrate.

Quoi…

hésione.

Ne réplique point ; quand ce grand coup t’étonne,
Vois que je suis ta Reine, et que je te l’ordonne,
Et si ta lâcheté me prépare un refus,
Ne me le fais savoir qu’en ne me voyant plus.
C’en sera l’assurance, adieu.

Sostrate
,

seul.
Que fuir ta vue
N’est-ce tout le péril d’un ordre qui me tue !
Mais las ! forcé d’aimer, quels seront mes souhaits
S’il faut trahir par tout, ou n’espérer jamais ?