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Et que ce triste cœur de vengeance animé,
N’a pu si bien haïr qu’il n’ait enfin aimé.
Non que par une lâche et honteuse victoire
L’amour à mon devoir puisse en ravir la gloire,
Au souvenir affreux de la mort d’un époux
Il me soumet soudain les charmes les plus doux,
Mais à quelques transports que cette mort me livre,
Il m’ôte en le vengeant le dessein de le suivre,
Et me vantant Sostrate, il force mon ennui
À chercher les moyens d’oser vivre pour lui.
C’est par là que flatté d’une douce espérance
Mon cœur s’est fait enfin le prix de ma vengeance,
Et que pour lui devoir un si précieux bien,
Ce qu’auroit fait mon bras, je l’ai remis au sien.
Cependant, et c’est-là ce que je me reproche,
Je le vois reculer plus ce grand coup approche,
Il tremble, et son amour prêt à se déclarer,
Toujours sur quelque obstacle aspire à différer ;
Mais puisqu’à menacer le tyran s’autorise,
Un péril si pressant ne veut plus de remise,
Il faut montrer ma haine, et que si jusqu’ici
La Princesse abusée a cru… mais la voici.


Scène IV


camma, hésione, phénice

hésione.

Madame, je ne sais si dans ce qui se passe
De mes ressentiments vous approuvez l’audace,
Et si de mon orgueil l’éclat impétueux
N’a rien pour Sinorix qui contraigne vos vœux.
Il tâche à les séduire, et le trône…

camma.

Oui, Princesse,
Mais qu’ils cèdent ou non, que ce scrupule cesse,