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Scène III


camma, Phénice

camma.

Ah, le perfide !
Il veut donc achever son lâche parricide,
Joindre la fille au père ! Ô mon unique espoir ?
Ô vengeance, est-ce ainsi que tu sers mon devoir ?

phénice.

Si dans vos déplaisirs la vengeance vous flatte,
Pour en jouir, Madame, il est temps qu’elle éclate,
Sinorix menaçant, rien n’est à négliger.

camma.

Quoi, tu doutes encor si je veux me venger ?
Par le noir attentat de ce tyran infâme
J’aurai vu dans mes bras Sinatus rendre l’âme,
Et me contenterai dans un si rude sort
De reprocher aux Dieux le crime de sa mort ?
Hélas ! Il me souvient de ce fatal augure
Qui d’un peuple étonné fit naître le murmure,
Quand lui donnant ma foi, le cœur tout interdit,
Le vase nuptial tout à coup s’épandit.
De ce triste accident l’infortuné présage
D’une secrète horreur saisit tout mon courage,
Et m’annonça dès lors les funestes malheurs
Qui pressent ma vengeance, et font couler mes pleurs.

phénice.

Pour bien l’exécuter, si vous m’en voulez croire,
Il faut que la Princesse en partage la gloire ;
Comme elle ignore encore le crime du poison,
Vos mépris, d’un tyran lui font en vain raison,
Elle les prend pour feinte, et croyant que dans l’âme
La seule ardeur du trône est ce qui vous enflamme,