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Et ses soins n’ont-ils pu la faire balancer
Sur l’hymen où pour lui vous la voulez forcer ?

Sinorix.

Il la voit chaque jour, Phaedime, et je puis dire
Que ce cher confident partage mon martyre,
Puisqu’à mes intérêts s’osant abandonner,
Il a pris malgré lui ce qu’il n’a pû donner.
S’il a brigué d’abord son hymen pour me plaire,
C’est un bien aujourd’hui qu’à tout autre il préfère,
Et quoi qu’il m’ait caché, le chagrin qui le suit
Trahit le désespoir où l’amour le réduit.
Aussi plus que le mien son intérêt me presse
D’embrasser un conseil qui bannit la Princesse.
J’ai fait naître sa flamme, et je lui dois offrir,
L’éloignant de ses yeux, une aide à le guérir.

phaedime.

Sostrate est généreux, et jamais un vrai zèle
Ne marquera pour vous une âme plus fidèle,
Mais ce fatal amour qui l’accable aujourd’hui,
Serait peut-être un crime à tout autre qu’à lui.
D’un bel espoir trahi l’irréparable offense
Sur vous de la Princesse attire la vengeance,
Et prétendre à son cœur, c’est presser son courroux
D’accepter une main qui la venge de vous.

Sinorix.

Contre moi de Sostrate il n’est rien qu’elle obtienne,
Mon amitié pour lui me répond de la sienne,
Sa vertu m’est connue, et ce que je lui dois
Ne me laisse aucun droit de douter de sa foi.
Cet amour que tu crains flatte en ce point ma peine
Qu’espérant d’être aimé si j’épouse la Reine,
Avec tant de chaleur il lui peint mon tourment…
Mais je la vois qui passe à son appartement.