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Et pour rompre du Roi ce second hyménée,
J’en ai par le poison tranché la destinée.
C’est peu de Sinatus à ma rage immolé,
Si mon devoir ailleurs n’est encor violé.
Hésione sa fille à qui son choix m’engage,
De mes lâches mépris souffre l’indigne outrage,
Et pour forcer les maux dont mon cœur est atteint,
Son exil est un ordre où je me vois contraint.

phaedime.

Mais lui-même à sa perte engagea votre flamme,
Il vous donnoit sa fille, et vous aimiez sa femme,
Et dans un sort si dur, la seule mort d’un Roi
De ce fatal hymen dégageoit votre foi ;
Mais de ce crime en vain l’ombre vous embarrasse,
Il n’en est point, Seigneur, que le trône n’efface,
Et dans quelques horreurs qu’on ait pu se porter,
Pour être absous de tout, il suffit d’y monter.

Sinorix.

Ce sont là des tyrans les damnables maximes
En qui l’impunité fait le pardon des crimes,
Et qui d’un noir forfait espérant quelque bien,
Après l’avoir commis ne se reprochent rien ;
Mais las ! Tu me plaindrois si tu pouvois connoître
Ce que dans un grand cœur le repentir fait naître,
Quand après un effort mille fois combattu,
Le crime par contrainte échappe à la vertu,
De son indigne objet sans cesse possédée,
L’âme en traîne partout l’épouvantable idée,
Un vif et dur remords n’en est jamais banni,
Et coupable un moment on est toujours puni.

phaedime.

C’est beaucoup que du moins cette mort qui vous gêne
Soit toujours un secret ignoré de la Reine,
Et qu’à Sostrate seul l’ayant su confier,
Vous n’ayez point vers elle à vous justifier ;
Mais comme enfin, Seigneur, Sostrate a de l’adresse,
Devient-elle inutile auprès de la Princesse,