Scène V
Approche, et si toujours la même ardeur t’enflamme,
Viens juger de ma peine au trouble de mon âme.
On nous hait, Stilicon, et tes sages avis
En tout temps pour l’état écoutez et suivis,
Dans mon gouvernement mêlent tant de foiblesse,
Que Rome se trahit d’en souffrir la bassesse.
Quoi, seigneur, l’insolence irait jusqu’à l’abus ?
On s’emporte à la plainte ? On murmure ?
On fait plus,
Et par une fureur que cette haine inspire,
On en veut à mes jours, Stilicon, on conspire.
On conspire, seigneur ?
Qui l’eust jamais pensé,
Qu’un perfide à ma mort se fut intéressé,
Et que né dans le trône où m’affermit ton zèle,
J’y dusse redouter une main infidèle ?
En vain l’ordre du ciel a daigné m’y placer ;
Tes soins m’en firent digne, et l’on m’en veut chasser.
Non, seigneur, ce seront de ces vaines alarmes
Qui servent d’un beau règne à redoubler les charmes,
Et qui par leur menace étonnant les esprits,
Du bien que l’on possède étalent mieux le prix.
L’apparence qu’un prince et si grand et si juste,
Que bien moins que son rang sa vertu rend auguste,