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Et mon zèle pour vous n’a fait que confirmer
L’injurieux orgueil qui l’empêche d’aimer.

EUCHERIUS

Jugez mieux d’un mépris dont le sort est complice,
Il détruit mon espoir, mais il lui rend justice.
Dans le chemin du trône à sa naissance ouvert
Placidie à son rang doit l’orgueil qui me perd,
Et de mon sang au sien l’union inégale
Ne lui sauroit souffrir un choix qui la ravale.
Fille de Theodose, et sœur d’Honorius,
Sa gloire est attachée à ses justes refus.
S’ils ont pour mon amour une rigueur insigne,
La faute en est au ciel qui m’en fit naître digne,
Et quelques rudes maux qu’il m’en faille sentir,
Je puis en soupirer, mais j’y dois consentir.

THERMANTIE

Quoi ? Vous consentirez qu’un traitement si rude
Assure un plein triomphe à son ingratitude,
Et que de vos soupirs l’hommage rejeté
Par trop de déférence enfle sa vanité ?
Non, non, mon frère, non, c’est trop faire l’esclave,
Il est temps de braver la fierté qui vous brave,
Montrez sous ses dédains un cœur moins abattu ;
Elle a de la naissance, et vous de la vertu,
Et de quoi que la flatte un peu trop d’arrogance,
Un seul degré peut-être en fait la différence.
Votre destin du sien peut-il mieux s’approcher ?
Elle naquit au trône où je vous fais toucher.
Le fils de Stilicon la feroit peu descendre,
Après que l’empereur s’est fait deux fois son gendre,
Et tout autre que vous se montreroit plus vain
Du rang d’impératrice où m’élève sa main.
D’un titre si brillant soutenez mieux la gloire,
Le plus foible combat vous offre la victoire,
Et vengeant par l’oubli votre amour négligé
Brise les fers honteux dont vous êtes chargé.