Au moins obtiens un temps de cette amour extrême
Où j’apprenne à t’aimer puisqu’il faut que je t’aime,
Que mon cœur à l’hymen se puisse préparer ;
Si tu n’oses le rompre, ose le différer.
Madame, vous savez que c’est cette journée
Dont hier le Roi fit choix pour ce grand hyménée.
Il va se rendre au Temple, et m’envoyoit vers vous…
Enfin ton intérêt est d’être mon Époux,
Et pourvu que ma main t’assure une Couronne,
Tu vois peu si mon cœur se refuse ou se donne ?
Mais du moins crains le Peuple, il murmure, il se plaint
De voir pour sa Princesse un choix qui la contraint,
Un choix qui détruisant l’union qu’il souhaite
L’arrache à Darius pour la laisser Sujette.
Comme on croit qu’il respire, il ne peut endurer
Qu’à ma main dans ce doute un autre ose aspirer.
Crains d’exposer le Roi, s’il s’émeut, s’il s’emporte.
J’aime en lui pour ce nom une chaleur si forte,
Mais n’appréhendez point, ayant reçu ma foi,
Qu’on voie un Darius se déclarer pour Roi.
Quoi qu’on fasse pour vous la Couronne est certaine.
Et bien, barbare, achève au péril de ma haine,
Prends cette triste main, prends et jouis d’un sort
Dont la nécessité me condamne à la mort ;
Mais si le Ciel est juste, il nous doit un exemple
Qui fasse voir…
Madame, on nous attend au Temple,
Voici l’ordre du Roi.
Dieux, puis-je y consentir ?