Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 2, 1748.djvu/489

Cette page n’a pas encore été corrigée

Et mettre en son pouvoir ce sang dont sa fierté
Avec tant de mépris traite l’obscurité.
Découvrons-en la source, en vain je la déguise ;
Mais j’en dois le secret d’abord à Mégabise ;
Et je veux opposer à mon sort rigoureux
Les fidèles conseils d’un Ami généreux.


Scène V


Darius, Mégabise.

DARIUS

Ah, mon cher Mégabise, est-il quelque disgrâce
Que ma triste infortune aujourd’hui ne surpasse ?
Avez-vous vu le Roi ? Savez-vous mon ennui ?

MÉGABISE

J’ai tout su d’Oropaste, il sortoit d’avec lui,
Et je ne puis assez condamner sa colère.
Mais aimer la Princesse, et ne l’avoir pu taire ?

DARIUS

J’ai failli, je l’avoue, et ce cœur outragé
Par ce qu’il souffre, hélas ! vous rend assez vengé,
Votre amitié sans doute eût secouru ma flamme ;
Mais aussi désormais je vous ouvre mon âme,
Et n’ai rien d’important dont je ne sois tout prêt
À vous abandonner le plus cher intérêt.

MÉGABISE

Votre cœur peut en moi prendre toute assurance,
Et pour en mériter l’entière confiance,
Je veux la prévenir par le plus haut secret
Qui demanda jamais l’Ami le plus discret.
Que par des sentiments dont la fierté vous blesse
Ochus à votre amour refuse la Princesse,
Qu’a pour vous ce refus qui vous doive étonner,
Si Darius respire, et vous la peut donner ?