L’Amour que bien souvent aveugle trop de zèle,
Contre ce qu’il ordonne aime qu’on se rebelle,
Et n’agit contre soi par quelque ordre confus
Qu’afin de s’assurer la douceur d’un refus.
Non qu’en vous conseillant un hymen nécessaire,
Vous ne deviez penser que j’aie été sincère ;
Au moins si ma foiblesse eût triomphé de moi,
Ce cœur vous demeurant n’auroit trahi que soi,
Et l’affreuse rigueur d’un éternel silence
Aurait sans doute assez expié cette offense ;
Mais dans les sentiments peut-être un peu trop doux
Que l’amour malgré moi me fait prendre pour vous,
Quand l’hymen d’un Tyran seroit cru légitime,
J’y voudrois résister pour m’épargner un crime,
Et ne pas m’exposer au coupable embarras
De lui devoir mon cœur, et ne le donner pas.
Puis-je dans cet aveu goûter assez ma joie
Lorsque je dois réponse au Tyran qui m’envoie ?
Que lui dirai-je, enfin.
Que je ne puis souffrir
Pour suivre la raison en connoît-il l’empire ?
En dois-je écouter moins ce que l’honneur m’inspire ?
Son seul emportement règle sa volonté.
Ma vertu contre lui fera ma sûreté.
D’un amour irrité la fureur est à craindre ?
Et bien, s’il est besoin, j’ai du sang pour l’éteindre,
Et faire voir à tous qu’aux malheurs les plus grands
Qui peut oser mourir peut braver les Tyrans.