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Que dans cette grandeur à moi-même importune,
Pour devoir trop à la fortune,
Je n’accorde rien à l’amour.
Dure fatalité, dont l’ordre tyrannique
M’asservit en esclave à ce que je me dois,
Et qui sur mes désirs jette un joug magnifique
Dont l’éclat déguise le poids !
Que me sert-il qu’un diadème
D’un absolu pouvoir soit l’infaillible appui ?
Que me sert de mon rang la majesté suprême,
Si je ne puis rien pour moi-même
Lorsque je puis tout pour autrui ?
Ainsi, quand tu vaincrois, ne crois pas, Cléomène,
Que mon amour osât se déclarer pour toi :
Tu peux par ton mérite égaler une reine,
Mais tu n’as pas le nom de roi.
Ce défaut qui fait mon supplice
N’offre point de remède à mon cœur abattu,
Et tel est de mon sort le scrupuleux caprice,
Que je te fais une injustice
Par un principe de vertu.


Scène II


Eriphile, Cléone.

ERIPHILE.

Et bien, Cléone, enfin que devons-nous attendre ?
Qu’as tu su ? Qu’a-t-on fait ? Et que viens-tu m’apprendre ?

CLÉONE.

Un succès qui sans doute à nos vœux étoit dû :
L’orgueil de Timocrate enfin est confondu,