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Partout son grand courage a contraint la victoire
De suivre ses désirs et respecter sa gloire,
Et bien plus souhaité qu’il n’étoit attendu
Ce vaillant Cléomène enfin nous est rendu.
La justice des dieux par son retour éclate :
Ils s’en veulent servir pour perdre Timocrate.
Ce lâche roi de Crète attaquant cet État
Veut d’un père perfide achever l’attentat ;
Déjà devant Argos sa flotte ose paroître,
Mais l’orgueilleux tyran n’en est pas encor maître,
Et nous lui ferons voir peut-être dès ce jour
Ce que peut un grand cœur animé par l’amour.

ARCAS.

Seigneur, dans le dessein de plaire à la princesse
Il semble qu’avec vous le destin s’intéresse,
Puisque par cette guerre il offre à votre bras
Tout ce qu’un bel espoir a d’illustres appas.
Combattez, et forçant l’orage qui s’apprête,
De son cœur à vos feux assurez la conquête,
Et de l’éclat d’un sceptre avec raison jaloux,
Le conservant pour elle, acquérez-le pour vous.

NICANDRE.

Hélas ! C’est cette guerre à moi seul trop contraire
Qui détruit mon espoir quand tu veux que j’espère.
Pour vaincre la rigueur de nos premiers destins,
La reine a fait armer deux princes ses voisins ;
Tous deux sont accourus au besoin qui la presse.
Cependant, cher Arcas, ils ont vu la princesse,
Et comme il est trop vrai que la voir c’est l’aimer,
Tous deux également s’en sont laissez charmer.
Ainsi dans ses désirs ma flamme opiniâtre
Trouve avec mon respect deux rivaux à combattre,
Et si ce seul respect tient mes sens étonnés,
Juge ce que feront deux rivaux couronnez.

ARCAS.

Quoi que ces deux rivaux vous donnent lieu de craindre,
Si vous n’en aviez qu’un, vous seriez plus à plaindre.