Mais ne m’en croyez pas, et d’un esprit remis
Allez sur cet accord consulter vos amis.
Je veux que leur aveu réponde à votre attente ;
Mais qui m’assurera que ma fille y consente,
Que son esprit soumis cède sans résister ?
Scène VI
Moi-même, puisqu’enfin vous en pouvez douter.
Si du Ciel en naissant je reçus quelque outrage,
Au dessus de mon sexe il m’enfla le courage,
Et ce doit être un charme à mes tristes ennuis
De vous venger du moins autant que je le puis.
Quoi, sans connoître à qui cet hymen te destine…
Ah ! Jugez mieux d’une âme où la vertu domine.
M’informez de son nom ce seroit balancer
Sur ce grand sacrifice où je dois me forcer,
Ce seroit à mon cœur par cette connoissance,
Mendier lâchement un peu de complaisance
Et souffrir qu’on doutât si m’aimant plus que vous
Je satisfois un père, ou choisis un époux ;
Non non, et quel qu’il soit, je n’en suis point en peine,
Je ne puis voir en lui que l’objet de ma haine,
Et de tous les tourments le plus affreux pour moi,
C’est sans doute celui de recevoir sa foi,
Mais vous devant le jour et le sang qui m’anime,
Je dois à votre honneur une grande victime,
Et crois ne pouvoir mieux en rétablir le cours
Qu’en lui sacrifiant le bonheur de mes jours.