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Scène IV


Léonor, Guzman.

LÉONOR.

Guzman, que j'ai dans l'âme un déplaisir profond !
On rit...

GUZMAN.

Et bien, riez comme les autres font,
C'est contre le chagrin un souverain remède.

LÉONOR.

Si l'on rit, c'est du feu dont l'ardeur me possède.
Et pour te découvrir le secret de mon coeur, [1575]
Le traître Don Alvar se rit de ma langueur.
Mais, Guzman, tire-moi de mon inquiétude.
Qui le peut obliger à cette ingratitude,
Car tu sais jusqu'ici qu'il m'a voulu du bien  ?

GUZMAN.

À vous dire le vrai, ma foi, je n'en sais rien. [1580]

LÉONOR.

Toi qui m'as tant de fois découvert sa pensée,
Quand de quelque soupçon j'avais l'âme blessée,
Tu ne me répons rien aujourd'hui là-dessus  ?

GUZMAN.

Je la savais alors, mais je ne la sais plus.

LÉONOR.

Il se cache de toi  ?

GUZMAN.

Bien plus qu'à l'ordinaire [1585]

LÉONOR.

Mais cette nuit encor, ce qui me désespère,
L'ingrat s'est voulu rendre à l'assignation,
M'a fait un entretien rempli de passion.
Cependant aujourd'hui, pour me couvrir de honte,
Il veut faire passer tout cela pour un conte, [1590]