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IV

Le Mémorial inutile.


Après une jeunesse passée dans la débauche, un marchand s’avisa de prendre femme ; bientôt sa jalousie devint proverbiale. Le souvenir de ses précédentes intrigues n’était pas fait pour le rassurer sur le sort des maris ; de plus, ce souvenir était incessamment ranimé chez lui par la lecture d’un mémorial où il avait noté, à mesure, chacune des ruses mises en œuvre par les femmes qui, à son profit, avaient trompé pères, frères et époux. Il faut, répondait-il quand, pour un motif quelconque, sa femme lui demandait à sortir, que je consulte les écritures. Alors il feuilletait le fameux manuel et, invariablement, il concluait de ses lectures que, si elle voulait sortir pour ce qu’elle lui disait, il l’accompagnerait. Ainsi il avait fini par la suivre partout et ne jamais la perdre de vue au dehors.

Pareilles façons d’agir ne pouvaient être du goût de la femme ; elle avait, du reste, eu l’occasion de mettre une fois la main sur le recueil des fredaines passées de son vieil époux ; comme on le pense bien elle avait dévoré avec délices ces pages voluptueuses et cette lecture avait fait naître chez elle des idées bien peu faites pour calmer son naissant désir d’aventures.

Après y avoir bien réfléchi, elle se résolut à mettre