Page:Töpffer - Voyages et aventures du docteur Festus, 1840.djvu/96

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pays, sur quoi, abandonnant la malle, il s’était mis à fuir de toute sa force, évitant les taillis et les champs de seigle. Il était ainsi arrivé vers le hameau de Coudraz, où apercevant de loin le Maire de l’endroit, qui jouait aux quilles devant l’église, il n’avait osé fuir outre, et était entré dans le grenier de Samuel Porret, où il vint se cacher dans la toiture, enfourchant l’arrière de la lucarne, afin de n’être pas vu d’en bas, et là chargea ses armes.

C’est ce qui fut cause qu’à l’ouïe de l’échelle qu’on y avait appliquée, il se crut de nouveau cerné, et lorsque George Luçon, arrivé au trentième échelon, se trouva face à face avec lui, il lui lâcha son coup, puis, s’enfuyant de l’autre côté du toit, pour échapper au village, il sauta dans une mare au grand préjudice de treize canards qui s’y récréaient, puis sortant de là sans fracture, il prit la venelle et s’enfuit par les champs.

Au moment où Jean Baune avait fui par le toit, il avait été vu du village qui cria tout d’une voix : Le voilà qui s’en va ! croyant que c’était le diable en personne qui s’échappait sous cette figure ; aussitôt ils tournèrent la maison pour le poursuivre, ce qu’ils firent jusqu’au soir de ce jour, que, n’ayant pu l’atteindre, ils revinrent au hameau. D’où le bruit se répandit que le diable hantait le pays, et en plusieurs endroits ils mirent le feu aux greniers à blé, ou processionnèrent par les routes