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par instinct de discipline. Tout en cheminant, il éprouvait de grandes migrations sur le ventre, sur le dos, sur le flanc, sous l’épaule et par les reins alors il se souvint de la fourmilière, et comme il était arrivé au bord du grand canal, il forma le projet de s’y baigner pour noyer les fourmis. S’étant déshabillé au pied d’un saule, il se trouva couvert de soixante-trois mille fourmis ; dont treize mille huit cent vingt-neuf portant leurs œufs, et les autres des brins de paille, à dessein de former une société nouvelle dans le local de son individu. Aussitôt Milord se jeta à l’eau ; mais auparavant il avait appendu à une branche du saule l’habit de maire surmonté du chapeau, ce qui formait une espèce de Maire aérien assez semblable à ces magistrats, qui, dans les champs, gardent le blé mûr contre les moineaux.

Aussi la force armée voyant Milord d’un côté, le Maire de l’autre, ne s’y trompa pas. Elle sentit bien (il y a un instinct dans les masses) que son chef véritable était au saule, et au lieu de se jeter à l’eau, elle s’aligna à dix pas, et garda une exacte discipline. En ce moment, un souffle de vent ayant soulevé la manche droite de l’habit, la force armée fit demi-tour à gauche, pas accéléré ; et, sur un nouveau mouvement, fit halte, et présenta armes avec une étonnante précision. Puis, le vent ayant beaucoup fraîchi et livrant l’habit à des mouvemens désordonnés, la force armée, toute