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revinrent en foule, et s’étant perchés sur les branches voisines, ils ressemblaient à une société d’hommes graves, qui préludent à un grand banquet, en savourant des yeux le mets principal.

Cependant Antoine, le fermier du docteur, et son fils Bénedict, qui faisaient leurs semailles de l’autre côté de la haie, entendant l’âne de Provence braire plus mélodieusement que de coutume, tournèrent la tête, et ils virent les trois bêtes chevalines jouant, ruant, pétaradant à qui mieux mieux ; en particulier le mulet, qu’ils reconnurent tout de suite, malgré la corde de Pécot qui lui pendait à la queue. Alors, inquiets de le voir ainsi revenir au logis sans y rapporter son maître, ils quittèrent leurs semailles, et ils s’en allaient à travers champs du côté de la grande route, comme pour s’assurer par leurs propres yeux si le docteur n’arrivait point à la suite de sa monture, lorsqu’ils le virent qui pendait à la branche maîtresse du noyer de douze ans. Aussitôt, montant sur l’arbre, ils décrochèrent le docteur avec précaution, et ils le descendirent à terre ; puis, après s’être assurés qu’il respirait encore, ils le transportèrent au logis, où ils bassinèrent son lit, le placèrent dedans, et attendirent qu’il plut au bon Dieu de le rappeler à la parole et au mouvement.

Le docteur Festus revint à lui dès cette nuit même, vers une heure du matin, mais ce fut pour