Page:Sylvain - En flânant dans les portages, 1922.djvu/88

Cette page a été validée par deux contributeurs.

LA RIVIÈRE DES EAUX-MORTES

Car ce n’est plus qu’une rivière espiègle et rieuse, toute au plaisir de vivre dans un endroit plaisant, qui, en dépit de son âge et jusqu’au dernier moment, ne cessera de faire l’école buissonnière.

Combien de fois, dans le calme des couchers d’automne ou la douceur chaude des crépuscules d’été, nous avons fait lentement glisser notre canot sur ses eaux alanguies !

Les oiseaux nombreux qui habitent ses rives, perchés pour le repos du soir, lançaient un dernier cri.

De grands hérons, au profil ridicule, passaient en battant lourdement l’air d’une aile pesante.

Les canards, par troupes, cancanaient, les pattes dans la boue.

D’instinct nous laissions traîner l’aviron, les mains sur les bords du canot qui s’échouait doucement sur une pointe de sable. Un orignal, de l’eau jusqu’au ventre, s’arrêtant de mâchonner des racines, nous regardait sans comprendre, son grand nez relevé flairant l’air suspect.

Comme à regret, le soleil s’enfonçait au loin