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APOLOGIE

Pas un cri, pas un chant, rien qui bouge ou qui saute ou qui vole. Seul, là-bas, coiffant une branche morte, est-il vivant ou mort aussi celui-là, un gros oiseau gris, las de chercher en vain une nourriture rare, immobile, se retient d’appeler.

Dans la fourche d’un hêtre, un écureuil maigre, assis sur son derrière et la queue retroussée, à défaut de noisettes, n’ayant rien à croquer, à même une «  cocotte » se sert à déjeuner.

Le vert nouveau des feuilles, craignant de trop reluire, s’est terni de précoces rousseurs. Que tu es triste, et vide, et morne, ô bois laurentien !

Et j’évoque, rêveur, la forêt tropicale…

De la terre molle et noire s’exhale un effluve enivrant. Une ruée de tiges, de feuilles, de fruits, étalent au soleil leur robuste splendeur. Débauche de sève triomphante !

Fougères géantes balançant dans l’air pur leur grâce ajourée ; palmiers nains, palmiers royaux, au tronc lisse et poli comme une colonne antique, portant un chapiteau de palmes authentiques. Et des fruits partout, et des senteurs capiteuses promenées