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52 COMMENCEMENT DE LA GUERRE ANGLO-FRANÇAISE.

lord Grenville avait exprimé à l’ambassadeur anglais à la Haye, lord Auckland, la ferme conviction acquise par le ministère que l’intérêt de l’Angleterre et celui de la Hollande exigeaient le maintien de la neutralité, quand bien même ces deux nations devraient s’imposer plus de patience et plus de longanimité que l’on n’en montre d’habitude en pareil cas. Le 13 novembre, cependant, l’ambassadeur hollandais, van Nagel, parut chez Pitt, pour lui dépeindre les dangers que courait son pays et lui demander la promesse de l’appui de l’Angleterre, en cas de besoin. Le ministre prit, à cet égard, un engagement formel, qu’il fit encore renouveler le 16 à La Haye par lord Auckland; toutefois, la protection la plus sûre pour la Hollande lui semblait toujours être le rétablissement de la paix générale. Il adressa donc le même jour un message aux puissances allemandes, pour leur demander à quelles conditions elles consentiraient à faire la paix avec la France et pour leur exprimer le désir de l’Angleterre d’intervenir comme médiatrice dans la négociation (1). Ce message ne fit pas plus d’impression en Prusse qu’en Autriche, car ces deux puissances ne songeaient en ce moment qu’à leurs projets de conquête, et elles savaient que l’Angleterre n’était favorable ni, au partage de )a Pologne ni & l’échange bavarois. Les deux cours évitèrent donc de donner une réponse précise à la note anglaise. Quant aux Français, leurs actes agressifs ne s’en activèrent que plus. On vit alors se succéder sans interruption l’ouverture arbitraire de l’Escaut à la navigation libre, les éloges des radicaux anglais à la Convention, le décret du 19 novembre et les menées des agents français dans Londres même. Pitt, se rendant lentement et comme malgré lui à l’évidence, finit par être forcé de reconnaître le changement survenu dans la situation. 11 avait placé jusque-là son orgueil dans le maintien de la paix, dans la prospérité et la liberté de l’Angleterre; il avait couvert le déficit, organisé l’amortissement de la dette, diminué l’effectif des armées de terre et de mer; il avait préparé l’extension des droits politiques, la réforme des lois électorales, la liberté de la presse, les progrès de la bourgeoisie, et, (i) Haeften aux Etats-genëranx, 9 janvier.- StrattonaGrem’Ule, 20 janvier 1793. – Lucchesini au ministère, 23 novembre 1792. Voir aussi les lettres de Pitt n son collègue, le marquis de Stafford, 13 novembre, dans Stauhopc, Pitt, 1!, 173.