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SITUATION DU PAYS. ~M

CHAPITRE m

.StTUATION DU PAYS.

Le système que les envoyés de l’Hôtel de Ville avaient déjà essayé d’établir l’année précédente, et que les commissaires de la Convention mettaient en pratique depuis le printemps, venait enfin d’être imposé à la France entière par l’application des lois. de septembre. Il était iégalement établi que quiconque se rendait suspect à la classe qui régnait alors encourait la perte de sa liberté, et que quiconque lui paraissait dangereux devait le payer de sa vie. Il était posé en principe que l’Etat pouvait à son gré s’emparer de tous les biens, et il n’existait plus pour les propriétés privées aucune garantie contre la convoitise des gouvernants. C’était une situation sans exemple jusque-lA dans l’histoire des grandes nations. On connaissait le despotisme qui n’accorde aucun droit à ses sujets il n’ost rare ni dans le vieil Orient ni dans l’Europe moderne, où, pourvu qu’il durât peu, il a quelquefois produit l’ordre et l’unité et conduit à de grands résultats. Mais ce que cette situation avait de particulier, c’est que, si l’on savait qui était asservi, on ignorait qui gouvernait. Une populace déchaînée, excitée par des passions diverses et dirigée par des démagogues divisés entre eux, régnait en despote sur la nation française c’était l’anarchie consacrée par la loi et investie de l’autorité souveraine, c’est-à-dire une contradiction qui ne pouvait produire que la mort et des ruines. Voyons d’abord de quelle manière les lois du 5 et du 17 septembre furent exécutées.

Nous connaissons déjà les procédés généralement employés. Le commissaire de la Convention envoyé en mission dans chaque département y formait le centre de l’action révolutionnaire. Dans les chefs-lieux, ce commissaire agissait par lui-même quant aux petites villes et aux villages, il y envoyait en son nom des patriotes connaissant les lieux, qui avaient tout pouvoir relati-