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LE PARTAGE. a07

lui que le roi de Prusse se vit forcé, en 179S, d’y coopérer: la ligne importante de la Vistule et de la Nareve, qu’alors il avait au moins obtenue, son successeur fut, en 1814, contraint de l’abandonner aux Russes. Depuis lors, tout contribua à confirmer l’appréciation de Pozzo di Borgo, lequel disait que la Russie avait conquis la Pologne ï pour s’ouvrir, par des relations immédiates avec l’Europe, un champ plus vaste sur lequel pussent se développer sa puissance, ses talents et son orgueil. » Supposons maintenant, à la place de Frédéric-GuiHaumeII, un prince qui eût été réellement le maître et l’arbitre des destinées de son peuple, et dont les résolutions et les actes eussent toujours été inspirés par un enchaînement de pensées mûrement conçues ce prince, dés qu’il serait devenu partie intéressée dans la question polonaise, aurait-il eu le pouvoir de contenir dans des limites infranchissables les désirs et les exigences de la Russie? En d’autres termes, l’hégémonie de la Russie futelle le résultat naturel de circonstances irrésistibles, ou ne futelle due qu’à des fautes qu’aurait pu éviter la politique allemande ? 2

Notre récit répond amplement à ces questions. Le point décisif fut, malheureusement, la jalousie profonde et enracinée qu’éprouvaient l’une contre l’autre les deux grandes puissances allemandes. Tant que la Prusse se trouva en face de la politique russe, sans se voir appuyée par l’Autriche, elle n’eut de choix qu’entre une rupture ouverte ou une dépendance complète, et, de même que les succès de Frédéric IIcni772 n’avaient été dus qu’à son court rapprochement avec l’empereur Joseph, demême le regrettable traité de Saint-Pétersbourg fut le résultat des dissensions survenues entre la Prusse et l’Autriche. Tant que l’on considéra à Berlin la cour de Saint-Pétersbourg comme un appui contre l’Empereur, tant qu’à Vienne l’alliance russe fut regardée comme un avantage obtenu sur la Prusse, tous les chemins s’ouvrirent d’eux-mêmes à l’ambition russe; et, dés lors, on ne pouvait s’attendre à voir la question polonaise traitée avec l’énergie et la prudence qu’eût exigées le bien général de l’Europe. Sous ce rapport également, la Prusse a commis des fautes en diverses circonstances mais l’Autriche, comme nous l’avons vu, la surpassa bientôt en fausses démarches. C’est le développement de ces