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202 DEUXIÈME PARTAGE DE LA POLOGNE.

de relier la Prusse à la Silésie s’était fait sentir plus fortement que jamais pendant la guerre de Sept ans. On avait donc, en 1793, bien des motifs pour se réjouir du but que l’on venait d’atteindre; c’était une conquête réclamée pour la Prusse par l’intérêt de sa propre conservation, et qui avait pour l’Allemagne du Nord la même importance que celle du Dauphiné pour la France. De plus, en voyant les frontières de la Pologne déjA si germanisées et toutes les institutions polonaises si ébranlées, les nouveaux possesseurs du pays pouvaient espérer qu’ils y prendraient facilement racine, et considérer dès lors la situation de la monarchie comme assurée à l’est.

Ces vœux se sont, il est vrai, bien vite évanouis en’fumée, et l’on a dit et redit que l’insuccès ne fut ici que le juste châtiment de la perfidie et du mensonge dont la Prusse s’est rendue coupable en aidant àfouler aux pieds la liberté d’un peuple allié. Je ne sais si un sentiment patriotique m’induit en erreur; mais je ne puis attribuera cette cause les catastrophes qui suivirent, malgré la vive répulsion que m’inspirent les brutalités partielles qui accompagnèrent ces événements et le mépris avec lequel le droit des gens a été méconnu. Nous avons déjà expliqué plus haut comment la Pologne, depuis le 3 mai, avait à peu près perdu le droit de revendiquer l’alliance conclue par elle avec la Prusse en 1790. Dans les rapports des peuples entre eux, ce n’est pas seulement de la lettre mais aussi de la base et du but d’un traité qu’on doit tenir compte or, bien que ce traité de 1790 eût été conclu expressément contre la Russie et l’Autriche, le parti patriotique, en 1791, s’était précisément étroitement uni à l’Autriche, de même que les Targowiciens à la Russie en 1792. C’étaient les Polonais qui avaient, à l’envi les uns des autres, rompu leur ancienne alliance avec la Prusse. Les patriotes n’avaient, comme nous l’avons vu, aucun doute à cet égard en 1791, et la Prusse n’avait jamais donné aucune assurance de protection à la confédération de Targowice il ne peut donc pas être question ici de violation de traité de la part de la politique prussienne.

Il est incontestable cependant que ni l’un ni l’autre des partis polonais ne s’était rendu coupable de la moindre offense à l’égard de la Prusse, quand celle-ci résolut le partage. La Prusse fu~