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Enfin, jusqu’au lecteur de notre paroisse, un brave homme, raisonnable et sensé, qui m’a envoyé dire deux ou trois fois de venir me faire enterrer décemment, ou de lui donner des raisons satisfaisantes du contraire ; ou si j’ai été enterré dans quelque autre paroisse, de produire mon certificat, comme l’acte l’exige[1].

Ma pauvre femme est devenue presque folle de s’entendre appeler la veuve Partridge, quand elle sait que c’est faux ; et une fois par terme elle est citée devant la cour pour prendre des lettres d’administration. Mais la plus grande vexation, c’est un misérable charlatan qui se pose comme mon successeur à mon nez, et dans ses cartes imprimées dit, avec un N. B., qu’il habite la maison de feu l’habile M. John Partridge, éminent praticien en cuir, médecine et astrologie.

Mais, pour montrer jusqu’où l’infernal esprit d’envie, de malignité et de ressentiment peut pousser certains hommes, mon vieux persécuteur anonyme m’avait commandé une tombe chez le marbrier, et voulait la faire ériger dans l’église de la paroisse ; et cette infamie notoire et coûteuse aurait réussi, si je n’avais pas usé de toute mon influence sur la fabrique, où il fut enfin décidé, à la majorité de deux voix, que j’étais vivant. Ce stratagème ayant échoué, apparaît une longue et noire complainte, décorée de sabliers, de pioches, de têtes de mort, de bêches et de squelettes, avec une épitaphe écrite

  1. Le statut de Charles II.