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J’échangeai avec lui quelques autres paroles que je ne puis plus me rappeler à présent ; et je crains d’avoir déjà fatigué Votre Seigneurie. J’ajouterai seulement cette circonstance, qu’à son lit de mort il déclara être non-conformiste et avoir eu pour guide spirituel un prédicateur fanatique. Après une heure de conversation, je pris congé, manquant tout à fait d’air dans cette chambre. Je pensais bien qu’il ne pouvait pas vivre longtemps : c’est pourquoi j’allai dans un petit café tout près de là, laissant un domestique dans la maison avec ordre de venir immédiatement me dire, aussi près que possible, la minute à laquelle Partridge expirerait, ce qui ne dépassa pas deux heures ; et alors regardant à ma montre, je vis qu’il était plus de sept heures cinq minutes ; par quoi il est clair que M. Bickerstaff s’est trompé d’environ quatre heures dans son calcul. Dans les autres circonstances il a été assez exact. Mais s’il a causé la mort de ce pauvre homme, aussi bien qu’il l’a prédite, cela peut très-raisonnablement se discuter. Néanmoins, il faut l’avouer, la chose est assez étrange, que nous entreprenions de l’expliquer par le hasard ou par l’effet de l’imagination. Pour ma part, quoique je pense que personne n’a moins de foi que moi dans ces matières, j’attendrai pourtant avec quelque impatience, et non sans espoir, l’accomplissement de la seconde prédiction de M. Bickerstaff, que le cardinal de Noailles doit mourir le 4 avril ; et si elle se réalisait aussi exactement que celle du pauvre