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cercle entier des arts dans cette ville, et je recommande cette affaire à l’attention de toute leur politique, et je me persuade qu’ils ne me refuseront pas leurs plus grands efforts, lorsqu’ils peuvent remplir à la fois deux objets aussi avantageux que de purifier la ville et d’y encourager la poésie. Et je n’en excepte pas les poètes satiriques et les libellistes, à cause de leur office ; car bien que, il est vrai, leur besogne soit de farfouiller dans les ruisseaux et de ramasser l’ordure des rues et des familles (et sous ce rapport ils peuvent être, que je sache, aussi nécessaires pour la ville que les boueurs ou les ramoneurs), cependant j’ai observé qu’ils ont eux-mêmes aussi des vêtements très-sales, et, comme les gens malpropres, laissent plus d’ordures et de saletés qu’ils n’en balayent.

En un mot, ce que je voudrais (car j’aime à être clair dans des matières importantes pour mon pays), c’est que quelque rue borgne ou impasse de cette ville pût être disposée, aux frais du public, pour servir de logement aux muses (comme Rome et Amsterdam en consacrent à des divinités d’un autre genre), et qu’elle fût entièrement réservée à nos beaux esprits, et garnie complètement de tout le nécessaire, tel qu’auteurs, réviseurs, presses, imprimeurs, colporteurs, boutiques et magasins, abondance de greniers et tous autres instruments et accessoires de l’esprit. L’avantage de ceci serait évidemment que nous aurions alors un dépôt assuré pour nos meilleures productions, qui maintenant pas-