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carrière. Deux raisons me poussent à vous encourager à cette étude : l’une, l’exiguïté de vos ressources présentes ; l’autre, la grande utilité de la poésie pour le genre humain et la société, et dans toutes les occupations de la vie. À ces points de vue, je ne puis que louer votre sage résolution de renoncer de si bonne heure aux autres stériles et sévères études, et de vous consacrer à celle qui, si vous avez du bonheur, avancera votre fortune, et fera de vous l’ornement de votre famille et de votre pays. Ce doit être pour vous une justification et un encouragement de considérer que l’histoire ancienne ou moderne ne peut vous fournir l’exemple d’une seule personne, ayant marqué dans aucune position, qui n’ait été, jusqu’à un certain point, versée dans la poésie, ou du moins bien disposée envers ceux qui la professent ; et je ne désespérerais pas de prouver, si j’étais légalement appelé à le faire, qu’il est impossible d’être bon soldat, théologien ou homme de loi, ou même éminent crieur public ou chanteur des rues, sans quelque goût pour la poésie, et un certain talent de versification ; mais j’en dirai d’autant moins là-dessus, que le célèbre sir P. Sidney a épuisé le sujet avant moi, dans sa défense de la poésie, dont je me bornerai à dire, pour toute remarque, qu’il raisonne comme s’il croyait réellement ce qu’il dit.

Pour ma part, n’ayant jamais fait un seul vers depuis les bancs de l’école, où je souffris trop de mes bévues en poésie pour en avoir eu le goût de-