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l’Aboliſſement du Chriſtianiſme.

remplie de foin, pourvû qu’on les détourne de ſe jetter ſur le troupeau.

L’intention des Couvents, qu’on trouve en ſi grand nombre dans d’autres païs, n’eſt pas ſi deſtituée de Sageſſe, comme on pourroit bien le croire. Il y a fort peu de paſſions irregulieres, & de penchans fougueux, qui ne puiſſent trouver le moïen d’avoir leurs coudées franches, & d’éclater librement, dans quelque Ordre Religieux. Tous les Cloîtres font autant d’Aſyles de Réveurs, de Mélancoliques, d’Orgueilleux de Grondeurs de profeſſion, & de gens à complot. Ils ſont les Maitres d’y évaporer les particules, qui ſeroient ſi pernicieuſes dans des membres ordinaires de la Societé ; au lieu que, dans notre Ile, nous ſommes obligez d’aſſigner à chacune de ces humeurs peccantes & dangereuſes une Secte à part, pour les empêcher de ſe jetter ſur l’Etat. Si jamais on abolit le Chriſtianiſme, il faudra de neceſſité, que les Legiſlateurs trouvent quelque autre moïen, pour en détourner le cours. Qu’importe de quelle largeur ſoit une porte que vous ouvrez, ſi vous étes ſûr, qu’il y aura un grand nombre de gens, qui ſe feront un honneur, &