Page:Swift - Le Conte du tonneau - tome 2 - Scheurleer 1732.djvu/103

Cette page a été validée par deux contributeurs.
79
Des Livres.

& pour lui rendre ſon premier éclat. Comment donc, Scelerate ! dit la Fille d’Arachné. Tu as encore l’effronterie de faire la railleuſe ? Tu ferois bien d’avoir un peu plus de reſpect pour une perſonne qui t’eſt ſi fort ſuperieure, de l’aveu de tout le monde. En verité, Madame, dit l’Abeille, le Parallele entre vous & moi ſeroit une piéce d’eſprit des plus divertiſſantes. Vous m’obligeriez fort, ſi vous vouliez bien l’entreprendre, & me communiquer les raiſons, qui portent tout le monde à vous mettre ſi fort au-deſſus de moi.

A ce diſcours, l’Araignée s’étant donné, à force de s’enfler, le veritable volume d’un Diſputeur ardent & impetueux, commença à argumenter dans le veritable eſprit de la controverſe, bien réfoluë de pouſſer ſes preuves avec toute la ſeurrilité d’une harangere, de n’avoir aucun égard aux objections, & de ne point changer de ſentiment à quelque prix que ce fût.

Je crains bien, dit-elle, de me faire tort, en me comparant à une malheureuſe comme toi. Tu n’ès qu’une vagabonde, une gueuſe, qui n’as ni feu, ni lieu, ni proviſions, ni heritage ; tes parens ne