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DU TONNEAU.

tirez par la rareté du fait, s’approchoient pour l’écouter, ou prénoient la liberté de rire de ſes contorſions, il ne manquoit pas de leur lacher ſon urine dans le nez, & de leur jetter la bouë à pleines poignées[1].

En hyver, il marchoit toûjours l’habit déboutonné, & auſſi peu couvert qu’il étoit poſſible, pour donner un libre paſſage à la chaleur répandue dans l’air qui l’environnoit ; &, en Eté,

  1. Rien n’eſt plus ordinaire aux Devots de profeſſion, que de couvrir leurs mauvais deſſeins du voile de la pieté ; & ils ne ſont jamais plus à craindre, que lorſqu’ils ſont dans les plus grands accès de leurs extaſes devotes. On dit que Cromwel, fameux Partiſan de Jean, ſe ſervoit quelquefois d’une Ruze aſſez particuliere, pour duper les Ambaſſadeurs, Eſpions privilegiez des Souverains. Quand il ſavoit, que quelqu’un de ces Meſſieurs étoit dans ſon Antichambre pour avoir Audience, il ſe metoit à prier tout haut le bon Dieu, avec toute la ferveur poſſible, de favoriſer tel ou tel deſſein. Le pauvre Ambaſſadeur, ne croïant pas qu’un homme fût capable de ſe moquer du Ciel, pour mieux tromper les hommes, ne manquoit pas de donner dans le Panneau ; &, par-là, ſon Maitre, ſe précautionnant contre un Projet chimerique, ſe rendoit incapable de prévenir les veritables deſſeins de cet illuſtre Fourbe.