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LE CONTE

poſer à la lumiere, c’eſt un jour pluvieux, le lendemain d’une débauche accès d’affection Hypocondriaque, un cours de Medecine, un Dimanche où l’on ne ſait que faire, un malheureux coup de dez, un compte peu laconique du tailleur, une bourſe vuide, une tête chargée de vapeurs factieuſes, une chaleur exceſſive, un ventre conſtipé, la diſette de bons livres, & un juſte mépris du ſavoir ; en un mot, tout accident de la vie, qui porte l’homme à ſe diſtraire, ou à ſe tirer de l’ennui, ſans ſortir de l’indolence. Sans ces raiſons, & d’autres trop longues à déduire ici, on verroit le nombre des Auteurs, & des Ouvrages, diminuer tellement, que la choſe ſeroit pitoïable à voir. Si vous voulez ſavoir une autre raiſon de la multitude de ces ſortes de Productions, écoutez avec attention les paroles du fameux Philoſophe Troglodyte.

Il eſt demontré, dit-il, qu’il y a certains grains de folie, qui ſemblent entrer dans la compoſition de la Nature humaine. Nous ne ſommes pas les maîtres de nous en défaire : nous n’avons que le choix de les garder au dedans de nous, ou de les étaler au dehors ; & il eſt facile de comprendre