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DU TONNEAU.

plûtôt laiſſer la Réforme imparfaite, que de gâter ſon habit de fond en comble. C’étoit-là, à ſon avis, la meilleure méthode, pour ſe conformer à l’intention & au véritable ſens des ordres de ſon Pere. Voilà la relation la plus exacte, que mes laborieuſes recherches m’ont mis en état de vous donner du procédé de Martin, dans une conjoncture ſi delicate.

Pour ſon Frere Jean, dont les Avantures extraordinaires abſorberont une grande partie de ce qui me reſte a écrire, il travailla à la déconfiture[1] de ſes ajuſtemens ſuperflus dans des diſpoſi-

  1. Il doit paroitre d’abord ſurprenant, qu’on atribue ici tant de Chaleur à Jean, & tant de Flegme à Martin. Il eſt certain, que ce dernier pouſſoit la conſtance juſqu’à l’obſtination, & la force d’eſprit juſqu’a la ferocité. Atrox animus Catonis. Calvin, au contraire, paroiſſoit d’un temperament plus doux ; &, d’ailleurs, c’étoit un Genie tout autrement tranſcendant que Luther. Mais, il étoit plus bigot ; & peut-être l’envie de n’etre pas un ſimple Imitateur & de ſe faire Chef de Secte l’a pu porter à faire des Innovations, Evangeliques dans le fond, mais imprudentes, & dangereuſes. Enfin, quel que fût ſon naturel, pluſieurs de ſes actions avoient le même caractere, que ſi elles étoient l’effet d’un zèle inconſideré.