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DU TONNEAU.

treregardez l’un l’autre avec la même attention ; pliérent les épaules, voïant bien qu’il étoit inutile d’entrer là-deſſus dans une nouvelle diſpute. Ils remarquoient aſſez, que Mylord étoit dans un de ſes accès d’extravagance ; & que, le contrarier, c’étoit vouloir le rendre infiniment plus intraitable.

J’ai trouvé néceſſaire de raporter ici cette affaire importante dans toutes ſes circonſtances ; parce que ce fut-là l’origine principale de la rupture, qui arriva environ ce tems entre ces Freres, qu’on n’a jamais pu racomoder dans la ſuite. Mais, j’aurai occaſion de parler plus au long de ce ſujet dans une des Sections ſuivantes. Il ne faut pas croire que Mylord Pierre n’eut de tems en tems de bons intervalles ; mais, dans ce tems-là même, il étoit fort libertin dans ſes expreſſions, chicaneur, deciſif, porté plutôt à ſe créver les poumons en diſputant, qu’à convenir qu’il s’étoit trompé dans la moindre choſe. D’ailleurs, il avoit un abominable talent de débiter de gros menſonges palpables, qu’il appuïoit par des Sermens afreux, en maudiſſant tous ceux qui refuſoient