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DU TONNEAU

briguer l’honneur d’être un Gueux dans les formes, il en coutte au plus riche aſpirant juſqu’à ſon dernier ſou ; ainſi, pour qu’un homme puiſſe s’établir dans le monde ſur le pied d’un vrai Critique, il lui en coute toutes les bonnes qualitez de ſon eſprit. Ce qui ſeroit un aſſez ſot marché, s’il s’agiſſoit de toute autre acquiſition moins importante.

Après avoir prouvé de cette maniere l’Antiquité de la Critique, & dépeint ſon état primitif, il me reſte d’entrer dans l’examen de l’état préſent de ce floriſſant Empire, & de faire voir l’exacte conformité de l’un & de l’autre.

Un certain Auteur, dont les Ouvrages ont été entierement perdus depuis pluſieurs ſiécles, en parlant des Critiques, dans ſon Livre 5. Chap. 8. appelle leurs Ouvrages les Miroirs de l’Erudition[1]. Or, quiconque ſait, que les miroirs des anciens étoit faits de cuivre, & fine Mercurio, doit comprendre par-là d’abord les deux principales qualitez d’un veritable Critique moderne, & être convaincu, qu’elles ont toûjours été les

  1. Citation imitée d’un Auteur illuſtre. Voyez la Diſſertation de Bentley.