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DU TONNEAU

une Allegorie, en diſant que les Naupliens, dans l’Argie, avoient appris des Anes l’Art de tailler les vignes ; en obſervant, que quand ces animaux en avoient rongé quelques branches elles en croiſſoient mieux, & en portoient de meilleur fruit.

Herodote, en ſe ſervant du même Hieroglyfe, s’exprime encor plus clairement. Il eſt bien aſſez hardi, pour taxer les Critiques ouvertement de malignité & d’ignorance ; car, il nous rapporte en pleins termes, que dans la partie occidentale de la Libye il ſe trouve des Anes avec des cornes. Sur quoi Cteſias rencherit encore, en faiſant mention de certains anes de la même figure, qui ſont dans les Indes : au lieu, dit-il, que tous les autres Anes n’ont point de fiel, ces Anes cornus en ont une telle abondance, qu’il n’eſt pas poſſible d’en manger la chair, à cauſe de ſon extrême amertume.

La raiſon, pourquoi les Anciens n’ont traité ce grand ſujet que figurément, étoit la crainte qu’ils avoient des attaques d’un parti auſſi redoutable que celui que formoient les Critiques de ces tems. Le ſon terrible de leur voix étoit capable de faire trembler une legion en-