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LE CONTE

loient pas ſe mettre au Paradis ; appelloient-ils un fiacre, le cocher les prioit de monter ſur le derriere en attendant leur maître ; lorſqu’ils entroient dans un Cabaret, le Garçon leur diſoit obligeamment, on ne vend point de biere ici, mes amis ; & s’ils vouloient rendre viſite à quelque Dame, le Laquais les arrêtoit à la porte, pour les prier de lui dire ſeulement leur meſſage, & qu’il leur rendroit réponſe dans le moment.

Dans cette malheureuſe ſituation, ils ne manquérent pas de conſulter le Teſtament de leur Pere. Mais, altum filentium ſur les Nœuds d’Epaule. D’un côté, l’obéiſſance étoit un point abſolument neceſſaire ; mais, de l’autre, ſans les Nœuds d’Epaule, point de ſalut.

Après une meure deliberation, un des Freres, plus lettré que les autres, s’aviſa d’un expédient. Il eſt vrai, dit-il, que le Teſtament ne fait point mention des Nœuds d’Epaule, totidem verbis ; mais, je conjecture, qu’il en parle incluſivement, ou totidem ſillabis[1]. Cette diſtinction

  1. Les ſubtilitez de l’Ecole, & les diſtinctions recherchées, ſont fort propres à éloigner les hommes du bon-ſens & n’ont pas peu contribué à introduire les abus dans la Religion Chrétienne.