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Dès que vous avez envoyé le second service, vous n’avez rien à faire (dans une grande maison) jusqu’au souper, c’est pourquoi lavez vos mains et votre figure, mettez votre mante à capuchon, et prenez votre plaisir parmi vos camarades, jusqu’à neuf ou dix heures du soir. — Mais dînez d’abord.

Qu’il y ait toujours une étroite amitié entre vous et le butler, car il est de votre intérêt à tous deux d’être unis ; le butler a souvent besoin d’un bon petit morceau friand, et vous avez beaucoup plus souvent besoin d’un bon verre de vin frais. Cependant, méfiez-vous de lui, car il est parfois inconstant dans ses amours, ayant le grand avantage d’allécher les servantes avec un verre de vin d’Espagne, ou de vin blanc sucré.

Quand vous faites rôtir une poitrine de veau, souvenez-vous que votre bon ami le butler aime le ris de veau, mettez-le donc de côté pour le soir ; vous pouvez dire que le chat ou le chien l’a emporté, ou que vous l’avez trouvé gâté ou piqué des mouches ; et puis à table le rôti n’en a pas plus mauvaise mine.

Quand vous faites attendre longtemps le dîner, et que la viande est trop cuite, ce qui est généralement le cas, vous êtes en droit de jeter la faute sur votre maîtresse, qui vous a si fort pressée de servir que vous avez été obligée d’envoyer tout trop bouilli et trop rôti.

Si presque tous vos plats sont manqués, comment pouviez-vous l’empêcher ? Vous étiez tracassée par les valets qui venaient dans la cuisine, et pour prouver votre dire, saisissez une occasion de vous fâcher, et