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sonne que ce soit propre au service de son pays, pour peu qu’elle ait de bon sens et de discernement. On est persuadé que tant s’en faut que le défaut des vertus morales soit suppléé par les talens supérieurs de l’esprit, que les emplois ne pourraient être confiés à de plus dangereuses mains qu’à celles des grands esprits qui n’ont aucune vertu, et que les erreurs nées de l’ignorance, dans un ministre honnête homme, n’auraient jamais de si funestes suites, à l’égard du bien public, que les pratiques ténébreuses d’un ministre dont les inclinations seraient corrompues, dont les vues seraient criminelles, et qui trouverait dans les ressources de son esprit de quoi faire le mal impunément.

Qui ne croit pas à la Providence divine parmi les Lilliputiens est déclaré incapable de posséder aucun emploi public. Comme les rois se prétendent à juste titre les députés de la Providence, les Lilliputiens jugent qu’il n’y a rien de plus absurde et de plus inconséquent que la conduite d’un prince qui se sert de gens sans religion, qui nient cette autorité suprême dont il se dit le dépositaire, et dont en effet il emprunte la sienne.

En rapportant ces lois et les suivantes, je ne parle que des lois originales et primitives des Lilliputiens. Je sais que, par des lois modernes,