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corps ; il faut donc que le remède agisse de même et combatte la nature ; et pour cela il est nécessaire de changer l’usage des orifices, c’est-à-dire d’avaler par celui d’en bas ; et d’évacuer par celui d’en haut.

Nous avons d’autres maladies qui n’ont rien de réel que leur idée. Ceux qui sont attaqués de cette sorte de mal s’appellent malades imaginaires. Il y a aussi pour les guérir des remèdes imaginaires ; mais souvent nos médecins donnent ces remèdes pour les maladies réelles. En général, les fortes maladies d’imagination attaquent nos femelles : mais nous connaissons certains spécifiques naturels pour les guérir sans douleur.

Un jour, mon maître me fit un compliment que je ne méritais pas. Comme je lui parlais des gens de qualité d’Angleterre, il me dit qu’il croyait que j’étais gentilhomme, parce que j’étais beaucoup plus propre et bien mieux fait que tous les yahous de son pays, quoique je leur fusse fort inférieur pour la force et pour l’agilité ; que cela venait sans doute de ma différente manière de vivre, et de ce que je n’avais pas seulement la faculté de parler, mais que j’avais encore quelques commencemens de raison qui pourraient se perfectionner dans la suite par le commerce que j’aurais avec lui.