le maître absolu de la vie, de la liberté et des biens de tous ses sujets ! Je ne dis pas ceci dans l’intention de rabaisser les vertus et les lumières de ce prince, auquel je n’ignore pas néanmoins que ce récit fera tort dans l’esprit d’un lecteur anglais ; mais je m’assure que ce défaut ne venait que d’ignorance, ces peuples n’ayant pas encore réduit la politique en art, comme nos esprits sublimes de l’Europe.
Car il me souvient que, dans un entretien que j’eus un jour avec le roi sur ce que je lui avais dit par hasard qu’il y avait parmi nous un grand nombre de volumes écrits sur l’art du gouvernement, sa majesté en conçut une opinion très-basse de notre esprit, et ajouta qu’il méprisait et détestait tout mystère, tout raffinement et toute intrigue dans les procédés d’un prince ou d’un ministre d’État. Il ne pouvait comprendre ce que je voulais dire par les secrets du cabinet. Pour lui, il renfermait la science de gouverner dans des bornes très-étroites, la réduisant au sens commun, à la raison, à la justice, à la douceur, à la prompte décision des affaires civiles et criminelles, et à d’autres semblables pratiques à la portée de tout le monde, et qui ne méritent pas qu’on en parle. Enfin, il avança ce paradoxe étrange, que, si quelqu’un pouvait faire croître deux épis ou deux brins