Page:Swift - Gulliver, traduction Desfontaines, 1832.djvu/13

Cette page a été validée par deux contributeurs.

qu’il la reconnût publiquement pour sa femme, et elle mourut victime du sot orgueil de Swift, qui ne cessa de la pleurer morte, après avoir rougi d’elle pendant sa vie. Cependant le docteur, se trouvant sans ressource depuis la mort de Temple, s’adressa au roi, qui lui avait promis des bénéfices, et il n’en obtint rien. Il lui dédia les ouvrages de Temple, et ne réussit pas mieux. C’est à ce mauvais succès qu’il faut attribuer l’aigreur répandue dans tous ses ouvrages contre les rois et les gens de la cour. Il résolut alors de retourner en Irlande, et il y jouit de deux petits bénéfices, jusqu’à ce qu’enfin il fut fait doyen de Saint-Patrice en 1713 ; poste qui ne répondait pas à l’étendue des vues que lui avait fait naître la faveur dont il jouit sous la reine Anne. Dès qu’il en eut pris possession, il alla résider à Lavacor, d’où il faisait de fréquens voyages à Dublin et à Londres. Sa façon de voyager tenait de la singularité de son caractère. Il allait assez ordinairement à pied ou dans les voitures publiques, et il logeait dans les plus minces auberges, avec les valets, les voituriers et les gens du menu peuple. L’habitude qu’il avait avec eux l’accoutuma sans doute