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hélène swarth.

CXVI.

À FORCE DE T’AIMER…


À force de t’aimer je te hais. — Tes yeux froids,
Ta bouche douloureuse et ton noble profil
Hantent mon insomnie et je hais mes émois.
Oh ! ton profond regard de sphinx que me veut-il ?

Mon orgueil s’est cabré sous le joug de l’amour.
Je hais mon propre cœur de t’aimer malgré moi.
Dans la blancheur des murs d’ivoire de ma tour,
Je cache ma pâleur, mes pleurs et mon effroi.

Sois fort, sois fier, souris d’avoir repris ton cœur,
D’avoir empli mon cœur d’un lent poison subtil.
Je ne veux pas mourir d’amoureuse langueur
Pour ta bouche qui souffre et ton noble profil.

Je n’aimerai plus rien, car mon cœur est amer,
Tu lui pris la douceur de vivre et de chanter.
La nuit, je descendrai de ma tour vers la mer
Et j’y noierai mon cœur. — Je ne veux plus t’aimer.