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souvenances.


Ô toi que j’ai maudit pour m’avoir éveillée,
L’autre m’a repoussée au seuil froid de ma tombe.
Ô cher ! soulève un peu la pierre entre-baîllée,
Pour qu’en tes bras aimants repose ta colombe.

Je viens me souvenir de nos heures d’extase,
Bien qu’elles aient laissé mon âme inassouvie.
Je viens bénir tes yeux et tes lèvres, ces vases
De lumière et d’espoir où je buvais la vie,

Tes lèvres qui mêlaient aux baisers la parole
De courage et tes mains de joie et de caresse,
Ton haleine au parfum de rose — oh ! la mort vole
Tout ce qui m’a charmée — oh ! tes bras fous d’ivresse,

Tes bras chers, où sont-ils ? — L’avare terre grise
A repris tout ton corps et rien de toi ne reste
Que ta suave haleine en l’odeur de la brise
Et le bleu de tes yeux dans le doux bleu céleste.