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— Mon Dieu, madame, je ne me fais pas d’illusion et je suis à peu près sûre de ne pas avoir l’étoffe d’une grande artiste… Alors, je me suis dit du théâtre ce que l’on dit du journalisme : entrons-y, ça mène à tout, à condition d’en sortir… Et voilà, aujourd’hui, j’essaye d’en sortir…

Irma Frodytte prend un air important. Très ignorante, elle affecte un détachement blasé lorsqu’elle parle diplôme, étude, science… D’ailleurs elle croit de bonne foi que ces choses lui sont familières, ayant ramassé quelques grands mots savants et quelques belles tirades sur l’art, les lettres, la politique, auprès de ses amants successifs et divers.

Elle interroge :

— Donc, vous êtes bachelière, si j’ai bien compris ?

— Hélas, oui, madame, répond Michette. Jusqu’ici ça ne m’a pas servi à grand’chose et je me suis efforcée de dissimuler cette faiblesse.

Irma a un petit sourire indulgent et consolateur :

— Allons, dit-elle, vous n’allez plus en dire autant car je crois que nous finirons par nous entendre toutes les deux. Vous me paraissez susceptible de dévouement et les études que vous avez faites sont suffisantes. Mais ce que je demande est assez compliqué : je veux trouver une personne qui soit à la fois dame de compagnie, intendante et secrétaire. Je veux pouvoir me décharger sur elle de tous les petits soucis de la vie quotidienne d’une artiste… D’autre part, j’écris mes mémoires, ou plutôt, je vous dis en substance quelques faits de ma vie et c’est vous qui vous chargez de les présenter. Enfin, je n’ai pas besoin d’insister, vous comprenez.

— Mais très bien, madame, fait Michette un peu inquiète tout de même…

Irma prend un temps puis :

— Voici les conditions : mille francs par mois, défrayés de tous frais de nourriture, logement et voyage. Cela vous va-t-il ?

Si ça lui allait à la petite Michette ! Elle à qui ses pas de