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Ma mère se consacra exclusivement à notre éducation et se crut obligée d’user de sévérité envers nous pour neutraliser les effets de l’indulgence de notre père et de notre aïeule. Cette sévérité comprima les tendres expansions d’Honoré, à qui l’âge et la gravité de son père inspiraient aussi la réserve. Cet état de choses tourna au profit de l’affection fraternelle ; ce fut certainement le premier sentiment qui s’épanouit et fleurit dans son cœur. J’étais de deux ans seulement plus jeune qu’Honoré, et dans la même situation que lui vis-à-vis de nos parents ; élevés ensemble, nous nous aimâmes tendrement ; les souvenirs de sa tendresse datent de loin. Je n’ai pas oublié avec quelle vélocité il accourait à moi pour m’éviter de rouler les trois marches hautes, inégales et sans rampes qui conduisaient de la chambre de notre nourrice dans le jardin ! Sa touchante protection continua au logis paternel, où plus d’une fois il se laissa punir pour moi, sans trahir ma culpabilité. Quand j’arrivais à temps pour